lundi 15 décembre 2008

Descente musclée de la gendarmerie dans les classes

Témoignage d’un professeur de CFA :
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Lundi 17 novembre 2008, 10h 30, Ecole des Métiers du Gers.
Je fais cours quand, tout à coup, sans prévenir, font irruption dans ma classe quatre gendarmes décidés, accompagnés d’un maître-chien affublé de son animal. Personne ne dit bonjour, personne ne se présente. Sans préambule, le chien est lancé à travers la classe. Les élèves sont extrêmement surpris. Je pose des questions aux intrus, demande comment une telle démarche en ce lieu est possible. On ne me répond pas, j’insiste, on me fait comprendre qu’il vaut mieux que je me taise.
Les jeunes sont choqués, l’ambiance est lourde, menaçante, j’ouvre une fenêtre qu’un gendarme, sans rien dire, referme immédiatement, péremptoirement. Le chien court partout, mord le sac d’un jeune à qui l’on demande de sortir, le chien bave sur les jambes d’un autre terrorisé, sur des casquettes, sur des vêtements. La bête semble détecter un produit suspect dans une poche, et là encore on demande à l’élève de sortir. Je veux intervenir une nouvelle fois, on m’impose le silence. Des sacs sont vidés dans le couloir, on fait ouvrir les portefeuilles, des allusions d’une ironie douteuse fusent. Ces intrusions auront lieu dans plus de dix classes et dureront plus d’une heure. Une trentaine d’élèves suspects sont envoyés dans une salle pour compléter la fouille. Certains sont obligés de se déchausser et d’enlever leurs chaussettes, l’un d’eux se retrouve en caleçon. Parmi les jeunes, il y a des mineurs. Dans une classe de BTS, le chien fait voler un sac, l’élève en ressort un ordinateur endommagé, on lui dit en riant qu’il peut toujours porter plainte. Ailleurs (atelier de menuiserie-charpente), on aligne les élèves devant le tableau.

Aux dires des jeunes et du prof, le maître-chien lance : « Si vous bougez, il vous bouffe une artère et vous vous retrouvez à l’hosto ! » Il y a des allées et venues incessantes dans les couloirs, une grande agitation, je vois un gendarme en poste devant les classes. J’apprendrais par la suite qu’aucun événement particulier dans l’établissement ne justifiait une telle descente.
La stupeur, l’effroi ont gagné les élèves. Ils m’interrogent une fois la troupe parti ; je ne sais que dire, je reste sans voix. Aucune explication de la direction pour le moins très complaisante. Je comprends comment des gens ont pu jadis se laisser rafler et conduire à l’abattoir sans réagir ; l’effet de surprise scie les jambes.
Au-delà de l’aspect légal ou illégal de la démarche, c’est l’attitude des gendarmes : très impolis, menaçants, ironiques, agressifs, méprisants, sortant d’une classe de BTS en disant “salut les filles”, alors que bien sûr il n’y a que des garçons, les félicitant d’avoir bien caché leur came et abusé leur chiens. À vrai dire, des marlous, de vrais durs n’auraient pas agi autrement.
C’est en France, dans une école, en 2008.
Je me dis que ces gens là, les gendarmes, devraient accompagner les gens, les soutenir, qu’ils devraient être des guides lucides et conscients. Au lieu de cela, investis d’un drôle de pouvoir, ils débarquent, on dirait des cow-boys, ils terrorisent les jeunes, ils sont comme des chiens.
J’aurais voulu que ça se sache car ça arrive chez nous, dans nos écoles et, c’est franchement inadmissible
."

Le directeur de l'établissement précise :
"C'est vrai que c'est impressionnant, mais on ne fait pas de la prévention avec de beaux discours. Nos jeunes commencent à avoir des salaires et sont donc la proie idéale pour les dealers. Nous avons voulu leur montrer la conséquence de s'engager sur un mauvais chemin. L'objectif était de poursuivre la prévention faite dans le cadre de la semaine d'accueil sur les risques liés à l'alcool et à la drogue, sachant que ça fait un effet boule de neige. Ils savent qu'il faut faire attention. Après, c'est vrai qu'il y a une partie qu'on ne maîtrise pas. Les gendarmes appliquent leur procédure. On peut être d'accord ou pas sur la méthode. Mais sur le fond, on se doit de protéger les élèves".
Par ailleurs, le directeur se félicite des prises somme toute restreintes. Preuve que la prévention est efficace. Au total, 39 grammes de cannabis trouvés sur un élève mineur (qui passera devant le tribunal pour enfant), 6 autres élèves majeurs en possession de produit en moins grande quantité et une petite balance de pesage.

La FCPE du Gers a condamné ces opérations des forces de l’ordre au sein des établissements scolaires, dans un communiqué paru à
http://npa31.org/attachments/FCPE%2032%20-%20communiqu%C3%A9%20action%20gendarmes%20Marciac.pdf
:
"Quelques jours à peine après la révélation du scandale des conditions dans lesquelles s’est déroulée cette opération anti-drogue au sein du Centre de Formation des Apprentis de la Chambre de Métiers de Pavie (Gers), les parents d’élèves ont été outrés d’apprendre qu’au même moment se menait une opération similaire dans un collège du département, celui de Marciac.
Cette fois encore, le comportement des militaires est révoltant, attesté par de nombreux témoignages croisés et concordants. Entrée dans les classes sans prévenir, simple avertissement lancé à la cantonade : "Nous allons faire entrer un chien! Mettez vos mains sur les tables, restez droit, ne le regardez pas! Quand il mord, ça pique !", entrée du chien qui s’acharne sur les affaires scolaires et les vêtements de certains élèves, sortie de ces élèves dans le couloir, fouille au corps de gamines de 13 ans ! Commentaires insultants : "On dirait qu'elle n'a pas de hash mais avec sa tête mieux vaut très bien vérifier ! On ne sait jamais..."

5 commentaires:

Sebastel a dit…

Ces méthodes sont indignes d’une démocratie comme la France ou alors c’est que la démocratie est en train de se réduire et que le fascisme prend sa place.

Rhââââââââââ!

Evidemment, c’est tellement plus simple pour résoudre les problèmes de sociétés de gouverner à la méthode Pinochet.

Pauvre France!

Régis a dit…

Et voila revenu le temps des dérives policières, comme pendant les périodes les plus sombres de notre histoire. Mais la police n’agit pas sans qu’on lui en donne l’ordre.
Et les ordres, c’est qui est-ce qui les donne?

Laurence a dit…

J’ai appris cette histoire en passant et je suis scandalisée. Heureusement qu’il y a Internet pour qu’on entende parler de ces dérives car sinon ça serait le néant avec la main mise du pouvoir sur les journalistes …

michel a dit…

l’endroit était bien choisit: un établissement d’enseignement professionnel de province et pas un grand lycée parisien
pour les flics, les gamins en apprentissage; c’est que de la racaille toxico
et puis en province, les gendarmes ont intéret à faire du chiffre avec les préfets qui mette la pression, alors ils lâchent les clebs
c’’est peut-être une première dans un établissement scolaire mais la méthode n’est pas nouvelle
et c’est devenu très fréquent dans notre pays depuis quelque temp

michel a dit…

c’est un peu loin mais j’ai trouvé un truc sur cette histoire de flics dans un collège en novembre dernier, sur le site http://bellaciao.org/fr/spip.php?article75419
plein de témoignages sur cette affaire
ex. une gamine de 13 ans Zoé qui raconte: "le chien qui s’appelait Bigo s’est acharné sur plusieurs sacs, en mordant et arrachant tout ce qui dépassait"
"le chien vient alors sentir mon sac"
"voyant que le chien ne scotchait pas, le dresseur lui a fait sentir mon corps avant de s’empresser de me faire sortir"
"le gars qui nous regardait, dit à l’autre gendarme: on dirait qu’elle n’a pas de hash mais avec sa tête mieux vaut très bien vérifier! on ne sait jamais..."
"ils ont souri et la fouilleuse chercha de plus belle! elle cherche dans les replis de mon pantalon, dans les doublures de mon tee shirt sans bien sûr rien trouver"
"elle fouilla alors dans mon soutif et chercha en passant ses mains sur ma culotte!"
etcétéra ...
tout ça dans un collège où on ne devrait pas traiter les minots comme des malfaiteurs, de manière humiliante et disproportionnée par rapport aux missions de la police

une autre histoire d’école avec ce directeur qui refuse d’appliquer les nouveaux programmes du ministre Darcos comme beaucoup d’instits et qui l’explique avec une lettre envoyée à l’Elysée
on peut lire la lettre sur le site http://uneecolepourvictorethugo.hautetfort.com/files/BC_LettrePresident_25-11-08.pdf
tout ce qui inquiète les enseignants dans les manifestations anti Darkos est dans cette lettre bien expliquée
comme la suppression des enseignants spécialisés pour les élèves en difficulté appelés RASED...
pour le remercier de ses explications, Sarkozy lui a donné une petite prime en lui retenant 12 jours de salaire!
il faut bien ça pour payer les petites augmentations de Carlito
si on veut pas laisser l’Agité de l’Elysée tout casser dans notre République, il faut continuer de suivre cette affaire qui nous concerne tous
il y a le site http://uneecolepourvictorethugo.hautetfort.com/
et aussi le site http://www.sauvonslesrased.org/index.php?p=4 pour signer une pétition contre la suppression des RASED avant les prochaines manifs